L’ANALYSE
Silence, on tourne
Traditionnellement, la fin d’année boursière est marquée par un « rally de Noël » qui donne un petit coup de pouce aux actions. C’était plutôt vrai ces trois dernières années, avec des hausses comprises entre 2,86 et 4,36 % pour l’indice large américain S&P 500. Bon, il est vrai aussi que 2018 a failli à la tradition dans les grandes largeurs, avec un -9,2 % douloureux pour les investisseurs. Mais à l’inverse du Père Noël, le rally de fin d’année existe : décembre est statistiquement le meilleur mois boursier depuis 1928 pour le S&P 500, avec 69 hausses pour 25 baisses. Devant le mois d’avril (61 / 33). Pour l’anecdote, c’est septembre qui ferme la marche, avec un ratio 42 / 51.
2021 était donc un millésime conforme au courant dominant. Pour le mois de janvier, c’est un peu plus compliqué. En pratique, les marchés boursiers hésitent, plombés par les anciennes stars de la cote. Mais savez-vous qu’il existe aussi un effet janvier en bourse ? L’effet janvier est la propension des marchés à croître en début d’année en s’appuyant sur des dossiers plus spéculatifs qui bénéficient d’achats à bon compte après que les gérants eurent pris leurs bénéfices sur les actions qui ont bien fonctionné sur l’année précédente. Mécaniquement, l’effet janvier a tendance à profiter aux valeurs moyennes plus qu’aux grosses car c’est dans cette poche que les investisseurs, avides de dossiers plus spéculatifs, trouvent les meilleurs candidats.
Cette année donc, les premières séances sont surtout marquées par une rotation des flux au profit des actions censément mal valorisées (dites « value ») et au détriment des valeurs de croissance. La remontée des taux directeurs de la Fed qui doit s’amorcer en mars selon les oracles financiers, explique ce mouvement. On retrouve aussi notre effet janvier précité qui exacerbe la situation en favorisant, justement, les valeurs décotées. Les grands gagnants viennent du secteur de l’énergie, de la finance et des matériaux de base. La santé fait moins recette – on a une fois de plus l’impression que nous sommes en train de nous débarrasser du coronavirus – et la technologie trinque. Les valeurs du Nasdaq aux multiples stratosphériques sont fort logiquement les premières à subir le choc. La vengeance de la value est peut-être en marche, après des années de sousperformance.
Patrick Rejaunier
© 2022 zonebourse.com, 18 janvier 2022