L’ANALYSE
Électrifions, qu’ils disaient…
L’Automobile a toujours tenu une place à part dans l’univers boursier, parce qu’elle représente à la fois une industrie traditionnelle, un secteur qui parle à toute la population et un baromètre des tendances macroéconomiques. Pour couronner le tout, la plupart des constructeurs et une fraction importante des équipementiers sont cotés en Bourse. Pendant très longtemps, les entreprises du secteur ont mené une vie planplan fondée sur la défense de leurs parts de marché et sur une innovation constante mais teintée d’un certain conservatisme. Cette époque est révolue : les gros remous entraînés par la crise financière qui a provoqué la faillite de certains acteurs, la transition écologique et la rupture personnifiée par Tesla ont rebattu les cartes.
Nous nous dirigeons donc vers un monde équipé de voitures électriques. Soit ! J’avoue que dans l’absolu, ça m’a l’air d’être une assez bonne idée, même si j’ai comme l’impression qu’on ne maîtrise pas tous les tenants et les aboutissants de cette stratégie. Et comme souvent, le destin nous a fait un pied de nez un peu cruel. C’est en effet à l’heure où la production d’électricité n’a jamais été aussi chère en Europe, peut-être même aussi rare, qu’on nous invite à la plus grande migration électrique jamais planifiée depuis des décennies. Si je vous avais proposé il y a un an de troquer votre berline allemande made in Bavière contre une électrique américaine made in California, je pense que vous auriez été une majorité à céder à la tentation. Mais à l’automne 2022, en va-t-il toujours de même ? Eh bien je n’en suis pas si sûr…
J’en parle d’autant plus ouvertement que c’est une question que je me pose depuis quelque temps. En cas de pénurie et d’énergie chère, la voiture électrique perd un peu de son sex-appeal. Or il se trouve que je dois devenir dans les jours qui viennent le propriétaire de l’un de ces véhicules qui s’abreuve d’électrons plutôt que de pétrole. Je ne pense pas que j’aurai à regretter mon choix, mais force est de constater que la donne a changé et que l’Europe doit apporter une réponse rapide et concrète au chaos énergétique actuel. Sans quoi nos grandes ambitions ne nous mèneront pas très loin. Pas plus loin que
la porte du garage en ce qui me concerne.
Patrick Rejaunier
© 2022 zonebourse.com, 20 octobre 2022